D a été développé pour la 3DO
en 1995 et a ensuite été porté sur Saturn, PlayStation,
et PC. L'histoire de son développement est presque aussi
intéressante que l'histoire du jeu lui-même. À l'époque
où il est sorti, D renfermait des scènes assez violentes
en plus d'aborder des sujets tabous comme le
cannibalisme. Pour passer sous les censures, le créateur
Kenji Eno a fourni une copie "propre" et démunie de
violence pour approbation, pour ensuite soumettre une
copie intégrale pour publication contenant toutes les
scènes plus violentes. Même si le jeu n'a peut-être pas
bien vieilli et peu paraitre désuet aux yeux de
plusieurs, c'est une belle petite curiosité et une
relique du passé intéressante.
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Laura... Lauraaa...
Laurraaaaa... LAURAAAAAA!!! You're so... so...
ugly! Non mais c'est vrai, regardez-là, elle est
épeurante! |
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L'histoire se déroule à Los Angeles. On incarne Laura
Harris qui, suite à un appel de la police, se rend à
l'hôpital où son père, le réputé docteur Richter Harris,
a perdu la tête et assassiné plusieurs personnes avant
de se barricader. Rendue sur place, à la vue des
cadavres dans les couloirs de l'hôpital, Laura a des
visions et se retrouve soudainement dans un château
médiéval où son père, sous une forme paranormale,
l'avertit de ne pas avancer plus loin. Mais même si elle
voulait rebrousser chemin, la porte derrière elle est
fermement barrée. Bien que ce ne soit jamais mentionné si
Laura est muette ou non, elle ne prononce aucun mot
durant la partie. À la place, on laisse le joueur vivre
les émotions pour elle.
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Dans D, on trouve
des objets et on les utilise devant leurs
endroits respectifs. Simple n'est-ce pas? |
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Même si c'est un jeu
d'horreur, D a plus en commun avec des jeux comme Myst que les Resident Evil
et compagnie, car il est pratiquement un film interactif. On se déplace avec une vue à la première personne
dans des environnements 3D présentés sous
forme de vidéos (FMV). Ça permettait d'offrir de superbes
environnements autrement impossibles avec la technologie
de l'époque pour créer un sentiment d'immersion encore plus atmosphérique. Cependant, ça vient aussi avec un prix;
Laura se déplace à une vitesse de tortue.
Nos déplacements sont aussi très limités, on a toujours
l'impression d'être sur des rails, car on ne peut
qu'emprunter des chemins tracés à l'avance. Néanmoins, le concept
est intéressant et bien fait. Après un certain temps, on
finit par s'habituer à la vitesse apathique et aux
mouvements limités, et on oublie que les décors sont des FMV, et on explore les lieux presque comme si on y était.
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Whooooooooo, you
got the wrong person! I'm Laura
not Lara! |
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Question que ça ne soit pas
trop monotone, le jeu varie beaucoup ses plans de
caméras qui passent parfois à la troisième personne,
comme pour
nous montrer Laura descendre un escalier ou utiliser un
objet, ou encore, pour nous présenter une
scène d'action. Non seulement ça nous donne une autre
perspective de vue de l'endroit, mais ça ajoute aussi un
effet cinématique, comme si on regardait un film.
D'autres endroits sont bien conçus pour nous faire
sentir comme si on était vraiment "physiquement" dans la
place. Je pense à l'endroit où Laura est
devant un miroir, et on peut la voir se tourner dans la
direction qu'on a choisi, comme si on était vraiment à
sa place et qu'on se voyait nous-mêmes dans ce miroir.
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Même s'il y a
plusieurs trappes dans le jeu, ce ne sont que
des séquences vidéo, il est techniquement
impossible de mourir dans D. |
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Le but du jeu consiste à retrouver le père de Laura avant
l'aube (5 am), ce qui implique de se rendre à la fin du jeu
dans un temps alloué de deux heures. Dans l'inventaire se trouve une petite horloge montrant le temps
restant avant l'échéance. Il est impossible de sauvegarder
sa partie ou la mettre sur pause, il faut terminer le
jeu d'un coup. Mais rassurez-vous, ce n'est pas aussi
laborieux que ça en a l'air. Le jeu est excessivement
court et se termine en moins d'une heure. Juste le
premier CD se termine en 15 minutes, ça vous donne une
idée. On n'a qu'un nombre très limité de pièces à visiter
et de puzzles à résoudre, et il est impossible de mourir,
on peut seulement manquer de temps si on est trop branleux. Si le jeu s'étend sur
trois disques, ce sont évidemment les FMV qui occupent
toute la place.
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Les puzzles sont
vraiment simples, non pas que je m'en plaigne. |
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Pas de combats, pas de morts
soudaines, la seule chose dans notre chemin ce sont des
puzzles, et ceux-ci sont très simples. Bien souvent,
ils ne consistent qu'à apporter un objet d'un point à
l'autre, ou
simplement de résoudre un petit jeu. Si un puzzle vous semble impossible, c'est que vous avez manqué un
indice quelque part. Ou sinon, comme si vous en aviez
absolument besoin, Laura possède un petit miroir qu'elle
peut consulter un certain nombre de fois avant qu'il ne
se brise pour avoir des indices. Plusieurs personnes
terminent D dès leur première fois. Le jeu n'a pas recours à des
essais-erreurs, des puzzles ridicules, ou des morts
stupides pour allonger sa durée de vie, et c'est tant
mieux.
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Pour chaque
scarabée que vous trouvez, Laura a un
flashback troublant de son passé. |
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Le jeu possède quatre fins
différentes dépendamment de vos choix et ce que vous
avez fait. Une de ces quatre fins c'est de simplement
manquer de temps et obtenir la mauvaise fin. On peut aussi trouver des scarabées dans les
environnements, pour chaque scarabée trouvé, Laura a
un flashback de son passé, ce qui ajoute un peu plus de
substance à l'histoire et fera du sens avec la révélation finale.
Malgré quatre fins différentes, le jeu reste le même, ce
ne sont que des petits détails mineurs qui influenceront la
fin que vous aurez.
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I will no longer be the man you know. |
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Le plus gros problème de D
c'est que le déroulement est passif au point où il est
presque soporifique. C'est un peu comme si l'on prenait
quelque chose de simple comme de ramasser une clée dans
un tiroir pour ouvrir une porte dans la pièce voisine,
et qu'on en faisait un événement en le passant au
ralenti pour que ça dure plus longtemps. Je comprends
que la lenteur est probablement là pour créer un effet
d'immersion ou de sensation
malsaine, mais quand on regarde le "grand portrait" de
ce que D a à offrir, on ne peut s'empêcher de réaliser
qu'on n'a traversé que quelques pièces pour arriver à la
fin, et que le tout était très générique et scripté. Le
jeu n'a pour ainsi dire rien de plus à offrir au niveau
gameplay que de se déplacer d'un point à l'autre sur des
chemins tracés en solutionnant des puzzles. Heureusement,
l'histoire est pas mal et les musiques créent une bonne
ambiance.
En fait, mon seul problème
avec l'histoire, c'est qu'elle débute bien et se termine
bien, mais ne se développe pratiquement pas durant le
jeu. On se retrouve avec le père de Laura qui fait des
apparitions pour l'avertir de ne pas aller plus loin en
répétant constamment son nom, ce qui devient presque
drôle à moment donné, même si la première fois c'était
macabre. Aussi, compte tenu que le
jeu est très visuel, j'aurais aimé plus de détails ou
d'indices dans les environnements pour ajouter de la
substance à l'histoire. Même si quelques trucs nous
portent à réfléchir et à analyser, c'est trop peu. Mais
sinon, l'histoire
est satisfaisante avec quelque scènes brutales et
grotesque, et je n'ai jamais vu venir la fin.
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Honnêtement,
combien de fois le chevalier vous a poussé dans
le trou avant que vous compreniez comment faire
la séquence de " quick time event" comme il faut? Sans
blague, près de 10 fois pour moi! |
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J'était prêt à donner une
meilleurs note à D, si ce n'était pas d'une séquence qui
lui fait perdre beaucoup de points. Je parle ici de la
fastidieuse «séquence de la manivelle».
Je comprends que le but des puzzles est de nous faire
perdre du temps, car le jeu est une course contre la
montre, mais le bout de la manivelle était juste pénible.
Grosso modo, on doit tourner une manivelle un certain
nombre de fois pour faire apparaitre des portes derrière
nous, mais ces portes n'apparaissent jamais aux mêmes
intervalles. Parfois, il faut tourner la manivelle une
fois, deux fois, ou trois fois... Et à chaque
fois qu'on tourne, il faut se retourner (lentement)
derrière pour regarder si la porte est là ou non. C'est une façon cheap et grossière
d'allonger le jeu. Faites que les intervalles soient
réguliers, ou donnez-nous un indice quand la porte sera
derrière!
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Ce bout-là à lui
seul a fait perdre quelques points à mon
appréciation de D. Non mais vraiment, ça ne
pouvait pas être plus pénible? |
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Malgré ses défauts, j'ai apprécié D, c'est juste qu'une
fois terminé, il nous laisse avec peu d'éléments pour
nous donner envie d'y revenir souvent. Pour l'époque,
les graphiques étaient impressionnants et le voice
acting n'était vraiment pas mal non plus. Maintenant, il
est pratiquement devenu une relique du passé qui montre
définitivement son âge. Mais je crois que si vous vous
intéressez à l'histoire des jeux d'horreur en général,
terminer D au moins une fois est recommandable. Une
autre bonne raison d'y jouer, c'est qu'il a une
semi-suite nommée Enemy Zero sur Saturn et une suite
directe nommée D2 sur Dreamcast. De toute façon, si vous
pouvez passer par dessus la lenteur du gameplay, vous
devriez venir à bout de le terminer rapidement et sans
trop de problème. |